Existant depuis plusieurs siècles, la tontine également appelée pacte tontinier est encore très peu connue des investisseurs immobiliers.
Et pourtant, lorsque vous décidez d’acheter un bien immobilier à plusieurs, l’achat en tontine permet d’échapper à certains pièges comme l’indivision.
De quoi s’agit-il concrètement ? Comment fonctionne-t-elle ? Sans plus tarder, découvrez les réponses dans ce tour d’horizon sur la tontine et le pacte tontinier !
Sommaire
La petite histoire de la tontine
Pour bien appréhender ce que c’est que la clause de tontine, il serait intéressant de comprendre l’origine de la tontine.
Celle-ci remonte au XVIIe siècle au temps du roi Louis XIV. À son accession au trône, les caisses de l’État étaient vides en raison des guerres incessantes et des grands travaux réalisés.
C’est alors dans le but de les renflouer que Lorenzo Tonti, un banquier napolitain inventa la tontine.
Son idée était toute simple : plusieurs souscripteurs versent de l’argent dans un fond d’état et reçoivent en contrepartie des dividendes.
À la mort de l’un des membres, ses parts seront partagées entre les investisseurs encore vivants. De ce fait, les dividendes rapportent de plus en plus avec le temps.
À la fin, c’est au dernier souscripteur encore vivant que revient la somme finale, ce qui peut représenter un sacré pactole.
La tontine s’apparente donc à une rente viagère et est un investissement à très long terme. Il est bien pratique pour les membres qui restent le plus longtemps en vie.
Toutefois, dans un pacte tontinier, vous ne pouvez rien laisser à vos héritiers.
La tontine telle qu’elle se présentait à ses débuts n’a pas connu un succès retentissant en France, car peu de personnes y souscrivaient.
Par contre, dans les pays anglo-saxons, elle s’était fortement développée avant d’être finalement interdite.
Bien comprendre l’achat en tontine en immobilier
Comme vous pouvez le constater, la tontine à ses débuts a plus été imaginée sous un angle financier.
Ce n’est qu’ensuite qu’une application dans l’immobilier a été trouvée.
Acheter une maison en tontine définie dans ce cadre comme une association dans laquelle les membres mettent en commun un capital pour l’acquisition d’un bien immobilier qui sera la propriété du survivant.
D’un point de vue juridique, elle désigne une « clause d’augmentation » qu’on insère dans le contrat qui lie les différents co-acquéreurs.
Le principe est d’ailleurs très simple : vous vous associez à d’autres personnes pour conclure l’achat d’un bien immobilier.
Il peut s’agir de votre compagne, de vos amis, votre concubin ou des proches. Aussi, il suffit d’être au minimum deux personnes pour vous lancer dans un pacte tontinier.
Avec le temps, les différents membres commenceront inéluctablement à mourir et vous aurez la chance de devenir l’unique propriétaire du bien si vous êtes le dernier membre en vie.
Ainsi, la qualité de propriétaire dans le cadre d’une tontine se fait de manière rétroactive.
Le dernier coacquéreur faisait en effet partie des propriétaires depuis le début de la clause de tontine.
Ainsi, tout se présente comme si le survivant a toujours été l’unique propriétaire du bien.
Par ailleurs, dans un pacte tontinier, l’unanimité est une condition sine qua non pour tout passage à l’action.
Ainsi, si les membres ne s’entendent plus par exemple, ils peuvent décider d’un commun accord de vendre le bien immobilier ou alors de laisser l’un d’eux en racheter la totalité.
Le pacte tontinier, pour lutter contre les problèmes de succession
Les biens obtenus par tontine immobilière ne font pas partie du patrimoine de la personne décédée.
De ce fait, les héritiers de ce dernier ne peuvent prétendre à aucun droit sur eux. Le pacte tontinier tel qu’il se présente permet donc de contourner les règles qui s’appliquent à la succession.
Il est généralement plus intéressant pour les couples non mariés ou par exemple dans le cadre des couples recomposés.
Il offre alors une garantie au conjoint survivant qui devient le propriétaire du bien.
La famille du défunt ou ses héritiers ne pourront pas l’obliger à sortir de la résidence comme on peut le constater souvent dans ces circonstances.
Cependant, la tontine ne doit pas être prise comme un prétexte pour déshériter un enfant. La législation française interdit en effet de priver un enfant de son héritage.
Si celui-ci se sent lésé et parvient à démontrer que vous avez conclu ce pacte tontinier à dessein, alors ce dernier peut être invalidé.
L’achat en tontine, un levier contre l’indivision
Avez-vous déjà entendu parler de l’indivision ?
Elle désigne un statut dans lequel plusieurs personnes sont collectivement propriétaires d’un bien en attendant que celui-ci soit partagé, par exemple.
Lorsque vous achetez un bien à plusieurs, vous êtes systématiquement sous ce régime sans qu’il ne soit nécessaire de mener des démarches administratives ou de payer des frais particuliers.
C’est d’ailleurs en cela que réside tout son intérêt.
Cependant, l’indivision est plutôt rigide dans son fonctionnement et souffre de quelques défauts.
Le Code civil stipule par exemple que « nul ne peut être contraint de demeurer dans l’indivision et le partage peut être provoqué, à moins qu’il n’y ait été sursis par jugement ou convention ».
De ce fait, l’un des membres peut demander le partage sans que les autres ne puissent s’y opposer.
Ils peuvent tout au plus racheter les parts de celui-ci.
C’est en cela que réside tout l’intérêt du pacte tontinier avec son principe de la rétroactivité.
Les coacquéreurs sont tous des propriétaires du bien et le décès de l’un des membres ne les oblige aucunement à racheter des parts pour maintenir leurs statuts.
Quelle fiscalité ?
Aux yeux de la loi, la tontine immobilière n’est pas considérée comme une donation ou comme un héritage.
Elle est au contraire considérée comme un acte à titre onéreux ; autrement dit, il s’agit d’un achat avec clause de tontine.
La fiscalité applicable devrait donc en principe être celle des droits de mutation à titre onéreux.
Ceux-ci sont d’ailleurs bien moins élevés que les droits de mutation à titre gratuit caractéristiques des droits de succession.
Cependant, pour empêcher certains acquéreurs trop rusés de profiter de la tontine pour faire de l’optimisation fiscale, c’est la fiscalité des successions qui lui est appliquée.
L’acquéreur final est alors dans l’obligation de payer des droits de succession. Ceux-ci sont calculés selon son degré de parenté avec le défunt.
Dans le cas des personnes mariées ou pacsées, le dernier membre encore vivant est entièrement exonéré des droits de succession.
Pour les concubins par contre, la note peut être salée pour le survivant. Elle s’élève à 60 % de la valeur totale du bien après un abattement de 1594 euros.
Ainsi, si vous êtes propriétaire d’un bien dont la valeur est estimée à 1 000 000 euros, l’État considérera qu’il vaut 600 000 euros et c’est sur cette valeur que vous serez taxé.
Afin de pouvoir permettre au concubin de payer les droits de succession, il est recommandé de combiner la tontine immobilière avec une assurance-vie dont il est le bénéficiaire.
Cependant, une exception existe à ce principe. Elle s’applique lorsque le bien du pacte tontinier est votre résidence principale et que sa valeur est inférieure à 76 000 euros.
Dans ce cas, la fiscalité qui s’applique est celle des droits de mutation à titre onéreux. Le survivant sera alors taxé à un taux maximum de 5,81 %.
Achat en tontine, quelles conditions respecter ?
Pour être considérée comme valide, la clause de tontine doit respecter un certain nombre de conditions.
Il doit notamment être un contrat aléatoire et financé plus ou moins équitablement par les différentes parties concernées.
La tontine : un contrat aléatoire
La tontine entre dans la catégorie des contrats aléatoires. Le caractère aléatoire dans ce contexte implique qu’il ne doit pas être possible de connaître à l’avance celui qui deviendra l’acquéreur final. Le gain pour l’un des contractants ne doit donc pas être certain.
Pour s’assurer que ce critère est respecté, la législation exige qu’une clause de tontine soit uniquement signée entre des personnes ayant à priori la même espérance de vie (même tranche d’âge et dont les conditions de santé sont similaires.
En effet, si l’écart d’âge est conséquent, on peut en toute logique deviner la personne qui mourra en premier.
Dans un tel cas, l’aléa n’est pas respecté et le pacte tontinier pourrait subir une requalification en donation avec son corollaire, un redressement fiscal en bonne et due forme.
Le financement
Dans un pacte tontinier valable, chacune des parties doit participer au financement.
Si les différents acquéreurs ne participent pas à la même hauteur ou si l’un d’eux n’apporte rien, cette clause de tontine peut être retoquée.
Les éventuels héritiers peuvent alors mener des actions en justice pour revendiquer le bien en cause.
La tontine immobilière, quels risques ?
Malgré ses avantages certains, la tontine souffre quand même de quelques défauts.
Tout d’abord, étant donné qu’elle n’est pas une indivision, toutes les décisions doivent se prendre à l’unanimité.
De ce fait, en cas de mésentente ou de conflit, elle peut rapidement devenir problématique.
Or, dans ces conditions, vous ne pouvez ni exiger ni le partage du bien en justice ni exiger sa vente.
Assurez-vous donc de maîtriser les tenants et les aboutissants afin de savoir si cela correspond effectivement à vos attentes.
Par ailleurs, dans le cadre d’une tontine immobilière, vous ne pouvez pas bénéficier d’un prêt immobilier dans les banques.
En effet, les établissements bancaires exigent au préalable la présentation d’une garantie. N’espérez pas non plus prendre une hypothèque pour votre tontine.
Les banques ne peuvent en effet pas se permettre de vous octroyer un prêt en se basant sur l’hypothèque d’un bien dont le propriétaire définitif n’est pas connu d’avance.
Pour conclure, je vous invite à contacter votre notaire si vous avez besoin de renseignements complémentaires sur l’achat en tontine ou le pacte tontinier.